Doucement

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​DOUCEMENT
Annika Boll & Winju
Vernissage le jeudi 25 septembre, 18 h – 21 h
Exposition les samedis et dimanches
20 – 28 septembre 2025, 14 h – 18 h
Montures mobiles ou numériques, personnifications ou archivages d’objets, notre exposition de septembre met en scène les œuvres d’Annika Boll et de Winju – un duo d’artistes aux disciplines contemporaines, contrastant douceur et fermeté. Elles impliquent les nouvelles technologies à notre rapport au corps et à la nature.
WINJU
Winju construit des œuvres robotisées, elle réalise des performances ainsi qu’elle produit leurs accessoires, elle sculpte, elle écrit, elle code, elle soude… Son travail est présenté dans des institutions importantes, telles que récemment au Botanique ou à l’Espace Vanderborght, mais aussi en galerie et à travers sa résidence en 2025 à l’iMAL – centre d'art et laboratoire – ou elle conçoit un projet de grande envergure mêlant jeux de lumières et de sons, mécanique et électronique, sculptures vivantes et expérience multidisciplinaire. Cet été, elle a participé à « Transat » aux Ateliers Médicis à Paris, de la réalisation in situ mêlée à un programme social. Winju conçoit non seulement des pièces artistiques, mais aussi des pièces telles qu’un bar gigantesque en sculpture de rocaille, ou même des œuvres rocambolesques pour un cirque. L’artiste lie des milieux très distincts, et ce pourtant dans un style cohérent, reconnaissable à sa patte et à son inventivité absolue.
Les thématiques et les formes abordées sont nombreuses, mais s’inscrivent dans un registre noir et parfois dur – avec des références concrètes aux piques, aux tentacules, aux lames. La tension et l’agression font partie de l’œuvre. Il se peut qu’une sculpture nous hurle dessus, une autre vient nous fouiller, nous sonder. Ce sont des allégories de nos peurs et de nos traumas refoulés. Prenant forme devant nos yeux, mécanisés et esthétisés, comme des corps, les œuvres se tordent et se contorsionnent. Les œuvres font souvent références au corps, appendices ou prothèse. L’acier industriel donne impression de froideur et de solidité, mais semblerait rouiller aux moindres intempéries en une analogie à la sécurité fragile. Ce sont des armures, dissimulant faiblesse, maux et vulnérabilités.
Ces thèmes sont aussi explorés par la culture de la musique Black Metal. À la surface, agressive et provocante, hurlante et radicale, dans le fond dotée de finesse, de soins et de musicalité juste et travaillée, une symphonie de sensibilités au-delà des apparences. Même dans les codes esthétiques du Metal, le noir et les piques sont des accessoires couvrant une timidité. Winju étend cette ironie dans son travail, les dualités, une invitation à pousser au-delà de la carapace. Elle explore cette nature humaine complexée, dans une société de dysfonctions. Dans le Metal, la souffrance est glorifiée, l’ordre se rompt pour dévoiler l’absurdité des paradoxes du contrôle.
ANNIKA BOLL
La pratique d’Annika Boll s’inscrit dans l’art digital mais se traduit aussi en sculptures, installations, gravures sur plexi, impression au laser, objets trouvés retravaillés… L’artiste ne se définit pas dans une discipline, mais explore la matérialité et construit des univers à partir de références et selon des projets et des séries de recherche. Lors de ses nombreuses résidences artistiques – un impressionnant parcours international – l’artiste réalise des œuvres in-situ en s’inspirant des lieux et des contextes s’offrant à elle. Elle monte des pièces aux arbres, elle pose des installations mobiles, elle reconstruit digitalement des serres entières, elle présente des films nous plongeant dans une réalité… pas tout à fait réelle.
Annika Boll s’inspire de la nature et génère une sorte d’archive. Comme un archéologue, elle documente et catégorise, elle met en scène des artefacts. Cependant, ce ne sont pas des objets trouvés, au contraire, ce sont des reproductions. Des moules, de l’impression 3D, des programmes de codes et des constructions numériques. Nous sommes confrontés à des œuvres curieuses, intrigantes. À partir de quelques références, par exemple, l’artiste réalise un film examinant une forêt… L’image est subtilement troublante. Une intelligence artificielle reproduit à l’infini les quelques références de base, sous des angles différents. Les œuvres d’Annika reprennent des éléments familiers, souvent de l’ordre de la nature, et les distordent, les répètent ou les positionnent hors contexte. Elle les régénère comme des fantômes du 21e siècle.
C’est aussi dans le jeu de la présentation que le travail de l’artiste se révèle. Les montures sont travaillées et font partie intégrante de l’œuvre présentée. Elle choisit des présentoirs de bijoux, plaque tournante pour déployer chaque détail d’une forme. Des enseignes de barbier sont utilisées comme contenant, montées aux arbres ou dans la galerie. L’exploration de présentation joue sur les questions de formes et de matérialité que le monde des écrans contraste à celui de l’organique. Des gravures sur bois sont collées à des écrans. Ici, la juxtaposition du digital et de la nature est littérale. Le modèle gravé n’est autre que celui d’une fausse texture de bois, ensuite disposée contre un film de vraies textures de bois. L’idée n’est pas de fractionner le vrai du faux, mais plutôt de questionner la réalité dans laquelle nous vivons, celle de la technologie. Les objets et la nature retracent et aspire une histoire, un vécu, que la technologie peut sublimer et retranscrire. Mais peut-elle d’elle-même être vecteur de profondeur et d’existence ? Le travail doux et très réfléchis de l’artiste allemande respecte ces différentes tangentes, nature – technologie – objet, et leur donne à chacune une légitimité.
